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Une onzième classe de Trente à l'International Students' Conference 24

Le récit et les impressions d'une élève d'XIème classe de l'école Rudolf Steiner de Trente (IT), après avoir participé à la International Students' Conference 24 à Dornach du 10 au 14 avril – la plus grande conférence organisée par la section jeunesse ces cinq dernières années.

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La rencontre des pôles dépend de nous

Vivre ensemble devient difficile tant le caractère anti-social de l’individualisation de nos sociétés prend le dessus et nous empêche de nous rencontrer. La multiplicité des points de vue conduit à toutes sortes de projets de vie qui souvent s’entrechoquent.

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Deux nouveaux membres au comité

Le 10 février 2023, lors de l'assemblée des délégués, Michèle Grandjean Cordes et Jonathan Keller ont été élus à l'unanimité par les délégués comme membres du Comité de la Société anthroposophique suisse. Une élection chaleureusement approuvée le lendemain par les membres. Le rapport à ce sujet est à lire dans «Anthroposophie – Suisse» III 2023. Le portrait suivant présente les impulsions et préoccupations de Michèle Grandjean Cordes.

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Deux nouveaux directeurs pour les Archives Rudolf Steiner

David Marc Hoffmann dirige les Archives Rudolf Steiner depuis 2012. En mars 2025 il prendra sa retraite. Dès le mois suivant, la direction sera assurée collégialement par l'enseignante Waldorf et slaviste Angelilka Schmitt et l'économiste et philosophe Philip Kovce.

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La fondation Edith Maryon

Le 2 mai 2024 sera le centenaire de la mort de la sculptrice Edith Maryon. La fondation de Bâle célèbre son éponyme.

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Pourquoi avons-nous besoin d’une Société anthroposophique ?

On ne devient pas membre d’une société ordinaire : c’est avec sa propre réalité à la fois humaine et cosmique qu’on s’intègre à ce nouvel édifice social, qu’on y participe et qu’on le constitue toujours à nouveau.

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Relance de mourir.ch

Le site Internet francophone mourir.ch a ouvert au public ce 15 décembre 2023 dans sa nouvelle version.

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Pourquoi avons-nous besoin d’une Société anthroposophique ?

100 ans après

anthropsophie

La Société anthroposophique fondée en 1923 avec son École supérieure libre de science de l’esprit a une importance centrale pour le développement de l’anthroposophie et son rayonnement dans les différentes réalisations qui s’en inspirent.
Mais elle est exemplaire d’un tout autre point de vue encore. Avec l’émergence graduelle du sentiment de liberté, nous avons besoin d’une forme qui permette d’accompagner l’épanouissement de cette liberté et de rendre féconds les fruits qui en résultent pour la société humaine en général. C’est une telle forme, correspondant à une sorte de quadrature du cercle au niveau social, que Rudolf Steiner a réalisée avec la Société anthroposophique : un modèle réplicable ensuite pour toute activité humaine qui se veut libre, engagée et responsable. C’est une véritable création, une première mondiale, encore pleinement valable aujourd’hui! Et comme membre de cette société, on participe à cette œuvre en devenir parmi les plus déterminantes pour l’avenir de l’universellement humain dans la civilisation.
30 ans plus tôt, jeune adulte, Rudolf Steiner énonce les fondements d’une telle liberté de l’être humain. A l’autre bout de sa vie, il cherche de plusieurs manières à établir les conditions cadres pour que ce potentiel de liberté puisse s’ancrer dans les relations humaines et dans la vie sociale. Son but, qui est aussi le but de toute l’époque de culture dans laquelle nous vivons : le développement d’une vie libre de l’esprit. Mais il se rend bien compte des dangers. En 1921 il dit : «La vie spirituelle deviendrait tyrannique si elle se répandait, car elle ne peut pas se répandre sans qu’une organisation n’intervienne, et si une organisation intervient, l’organisation elle-même devient aussitôt tyrannique. C’est pourquoi il faut continuellement lutter en toute liberté, en toute liberté vivante, contre la tyrannie à laquelle la vie spirituelle elle-même tend.» Ici se manifeste dans toute sa dramatique, la situation de la vie libre de l’esprit dès qu’elle se met à toucher concrètement les relations humaines, qui d’une certaine manière prennent toujours la forme de relations de droit.
Or quelques phrases auparavant Rudolf Steiner ouvre dans son exposé une perspective importante à laquelle il faut prendre garde lorsqu’on se trouve en Suisse et que l’on entre en contact avec les relations de droit. Car autrement qu’en France, en Allemagne ou ailleurs en Europe, «pour le cœur des hommes, le droit romain s’est en fait brisé sur les montagnes suisses». Et c’est dans ce contexte, qu’il précise «les anges du monde entier regardent la Suisse pour voir si ce qui s’y fait est judicieux.» C’est une image puissante et forte de sens, mais attention de ne pas interpréter trop hâtivement : il est question du cœur des hommes et c’est avec ce cœur qu’il va falloir apprendre à observer. Je ne crois pas qu’il soit possible d’aborder de manière fructueuse la fondation de la Société anthroposophique au Congrès de Noël sans prendre cet aspect particulier du droit, tel qu’il vient d’être évoqué. Car le défi pour Rudolf Steiner est bien de donner une organisation à la vie de l’esprit d’orientation anthroposophique, à l’anthroposophie, pour qu’elle puisse prendre son essor et porter ses fruits dans la civilisation, sans toutefois verser dans la tyrannie. En quoi cela consiste-t-il? Justement en cela que les relations humaines soient décrites par ce qu’elles sont et non définies par des statuts, afin que le droit en lui-même ne puisse monter en puissance, prendre le dessus et obliger à quoi que ce soit.
Car à quoi sommes-nous confrontés en matière de formes juridiques par le droit suisse. Celles qui sont reconnues comme des personnes juridiques autonomes ne sont pas nombreuses : l’association, la fondation, la société anonyme ou la société coopérative et la société à responsabilité limitée. Toutes ces formes sont pourtant conçues en un temps où ce n’est pas la confiance en l’individu libre qui était la norme, mais la méfiance. Toutes sont prévues pour contrôler et s’il le faut limiter l’esprit d’initiative dès qu’il ne répond plus à l’attente de la majorité. Autrement dit, ce ne sont jamais les porteurs d’initiatives qui ont le dernier mot, mais celles et ceux qui se rassemblent autour de l’initiative, c’est-à-dire de l’assemblée générale. C’est un problème récurrent qui donne raison à la société humaine en général de se méfier de l’être humain individuel. Et on peut le comprendre. Pourtant, l’émergence de la liberté ne peut être ignorée plus longtemps et elle a besoin d’un cadre approprié pour qu’une vie spirituelle libre puisse se développer et apporter son potentiel dans le renouvellement de la société, sans qu’elle dérape en tyrannie.
Et c’est bien un acte d’une telle portée que Rudolf Steiner inaugure avec la création de la Société anthroposophique à Noël 1923. En fait, et vu d’aujourd’hui, il ne fait rien de moins que répondre au regard attentif des anges du monde entier et s’engage sur un chemin qui précise les contours d’une société nouvelle, avec des relations humaines nouvelles, un droit nouveau qui ne définit pas, mais qui caractérise, un chemin que nous devons prendre soin d’approcher avec un sentiment retenu pour que le cœur puisse percevoir et qu’en découle l’attitude correspondante.

Comment s’y prend-il?
Il commence par susciter la création de Sociétés anthroposophiques partout dans le monde où l’anthroposophie est vécue et approfondie. C’est de manière décentralisée et autonome, en accord avec les façons de faire propre à chaque pays, que prennent naissance ces Sociétés anthroposophiques, mais aussi avec des statuts ancrés dans le droit tel qu’il existe et est vécu sur place, ici ou là. La forme juridique est différente selon qu’on est en Suède, en France ou aux Pays-Bas. Même la Société originale est ramenée à sa dimension nationale, en Allemagne. Ici, ce sont les différents droits nationaux qui prévalent.
Le Congrès est ensuite convoqué par la Société suisse pour Noël 1923 et prend ainsi un caractère d’assemblée de délégués des différentes sociétés et groupes actifs existants dans le monde, à laquelle participent aussi les simples membres présents ou qui ont pu faire le voyage.
Le porteur d’initiative, c’est Rudolf Steiner lui-même. C’est lui qui incarne l’impulsion de ce Congrès de Noël. Il y vient avec un projet de statuts fondateurs d’une nouvelle Société anthroposophique, projet qui est lu en introduction à l’assemblée réunie à Dornach.
Dans un acte constitutif solennel, il appelle ensuite chacune et chacun à créer intérieurement le lien entre sa réalité corporelle humaine et la réalité cosmique qui l’entoure et dont il est un reflet – microcosme et macrocosme. Et de la substance de ce lien à former la Pierre de fondation de la Société anthroposophique, et à la déposer dans son propre cœur. On ne devient pas membre d’une société ordinaire : c’est avec sa propre réalité à la fois humaine et cosmique qu’on s’intègre à ce nouvel édifice social, qu’on y participe et qu’on le constitue toujours à nouveau. Alors la Société anthroposophique peut devenir d’une part ce corps dont l’anthroposophie a besoin pour son rayonnement et d’autre part ce modèle pour le développement de l’impulsion de la liberté dans la civilisation comme germe d’une vie culturelle vraiment libre. Et c’est pour cela que, 100 ans après, nous avons besoin d’une Société anthroposophique!

Le Congrès est ouvert, et le ton est donné!
Cette forme, elle s’exprime dans un projet de statuts qui sont abordés l’un après l’autre, jour après jour, au cours du congrès. On y découvre deux qualités de membres, de la société elle-même et d’une école qui comporte trois classes. On s’y reconnaît dans ses fondements. On y rencontre le comité et la description de ses responsabilités, mais une chose surprend : il n’y a pas d’article qui précise comment ce comité est nommé et renouvelé.
Et je dirais que c’est justement en cela que cette forme devient exemplaire, archétypique pour qu’une vie culturelle libre puisse se développer sainement sans devenir tyrannique. Elle repose sur la rencontre de la libre initiative avec une libre réceptivité et reconnaissance.
Rudolf Steiner est l’initiateur de cette nouvelle Société anthroposophique. Il propose des statuts et les discute en assemblée, approuve tel ou tel complément ou modification. Mais il y a une chose qui n’est pas à discuter : il en prend la présidence et choisi lui-même ses collaborateurs au comité. C’est une condition sine qua non. Et lors de l’approbation finale des statuts, avec l’ajout du dernier article précisant les membres du comité, il insiste : le comité n’a été ni élu, ni nommé, mais constitué lors de l’assemblée, pour ainsi dire désigné par la cause.
Ce trait particulier est la caractéristique nécessaire et peut-être aussi suffisante pour qu’une vie culturelle libre puisse se développer sainement. Et c’est ce qui fait de la Société anthroposophique le modèle pour toute initiative libre dans le monde entier. Que ce soit un Goetheanum, une ferme agricole, un cabinet médical, une auberge, une école, toute activité humaine aura toujours une ou plusieurs personnes qui en seront les porteurs, celles et ceux qui en auront eu l’idée et qui en assumeront la responsabilité et le devenir. Ils seront entourés des plus ou moins nombreuses personnes qui reconnaîtront le bien-fondé de ces initiatives et qui en deviendront membres, sympathisants, partenaires, peu importe le terme correspondant.
Mais pourquoi donc faudrait-il que ces personnes alentour reçoivent un droit de décision sur l’évolution de l’activité? Qu’est-ce que c’est que cette idée saugrenue d’assemblée qui aurait le dernier mot, qui même serait l’organe suprême de l’initiative? Cela ne fait aucun sens. Du point de vue d’une vie libre de l’esprit, c’est même complètement déplacé. Car ça empêche les initiateurs de porter leurs responsabilités. C’est justement là qu’il faut, comme membre, être attentif et venir avec la volonté de soutenir et de porter avec et non d’imposer sa propre vision, et protéger l’espace nouvellement formé des mauvaises habitudes qui appartiennent à un autre lieu et à un autre temps.
Si nous y arrivons, il se produit une sorte de miracle. Lorsqu’une impulsion portée par une libre initiative est librement reçue dans son entourage, reconnue et comprise, alors s’ouvre pour ses porteurs un espace par lequel ils peuvent être inspirés et ressourcés. Cet espace reste vide si le comité agit sous mandat, obligé par une majorité établie dans l’assemblée. Pratiquement ce n’est donc qu’une fois que cet espace de liberté est initié et reconnu par des membres – pour ainsi dire même protégé par cette reconnaissance – que peut s’ouvrir une réponse de nature spirituelle, inspirante, qui vient confirmer l’élan et donner de la portance à l’initiative d’un comité.
Cela dépend seulement de l’attitude avec laquelle, comme membre et comme comité, nous entrons dans l’espace de rencontre de l’assemblée. Sommes-nous prêts, au sens de ce que nous portons en nos cœurs de la Pierre de fondation d’y venir pour que soit bon, ce que nous voulons? Pour cet exercice-là aussi, 100 ans après, nous avons besoin d’une Société anthroposophique.

Marc Desaules

 

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